Dans cet article, je partage ce que mon systÚme nerveux a vécu lors de mon interview avec le podcast La Matrescence le 18 Novembre dernier (épisode à paraßtre), et ce que cela nous apprend sur les enfants anxieux ou stressés. Entre surprises, peurs, fierté et apprentissages corporels, je vous détaille à partir de mon vécu comment le corps et les émotions interagissent dans des situations de stress.
Si vous prĂ©fĂ©rez aller directement aux complĂ©ments que je souhaite apporter Ă l’Ă©pisode de podcast, pour en savoir plus et/ou pour aider concrĂštement votre enfant, vous pouvez lire l’article suivant : (lien Ă venir).
Un mail presque anodin⊠et 16 minutes plus tard, surprise totale
Un jour de septembre, jâai rĂ©pondu Ă un petit apartĂ© dans la newsletter de ClĂ©mentine Sarlat, depuis mon mail personnel. Elle parlait du sommeil de ses enfants, et je me suis demandĂ©e : et si leur systĂšme nerveux avait quelque chose Ă voir avec leurs rĂ©veils nocturnes ? Et si certains rĂ©flexes archaĂŻques non intĂ©grĂ©s jouaient un rĂŽle ?
Jâai envoyĂ© ce petit âtipâ incognito. Je pensais passer inaperçue.
16 minutes plus tard, je reçois un mail de lâĂ©quipe de La Matrescence : elles ont regardĂ© mon site et pensent quâun Ă©pisode sur ce sujet pourrait ĂȘtre intĂ©ressant.
Mon systĂšme nerveux a buggĂ©. FigĂ©. CafouillĂ©. âQuoi ? Mais comment ?â
Je ne mây attendais clairement pas, et encore moins Ă une rĂ©ponse si rapide. Jâavais Ă©tĂ© vue, reconnue.
Jâai eu envie de dire non, tellement peur de plein de choses. Mais jâai finalement dit oui (9 jours plus tard !). Consciente de lâoccasion en or : faire connaĂźtre Ă de nombreux parents des outils pour aider leurs enfants, mais aussi pour moi, Ă©voluer et affronter certaines (nombreuses) peurs.
Dire oui… avec un systĂšme nerveux en alerte
Peurs & souvenirs passés
Dire oui nâa pas fait disparaĂźtre la peur. Bien au contraire. Ă partir de ce moment-lĂ , elle Ă©tait lĂ , bien prĂ©sente, et elle sâest manifestĂ©e de diffĂ©rentes façons, parfois trĂšs clairement, parfois plus en arriĂšre-plan.
Je savais que cette interview serait filmĂ©e, diffusĂ©e en audio sur les plateformes de podcast et aussi en vidĂ©o sur YouTube. Je savais aussi quâil y aurait trĂšs probablement des stories et des posts Instagram autour de lâĂ©pisode. Bref, je savais que je serais entendue⊠et aussi vue, assez largement, au vu de lâaudience de La Matrescence.
Or, les derniĂšres fois que jâai Ă©tĂ© enregistrĂ©e et filmĂ©e pour une « prestation », jâĂ©tais collĂ©gienne. Je faisais partie dâun chĆur dâenfants, je chantais plusieurs heures par semaine, et ça, jâaimais beaucoup. Chanter au milieu dâune chorale, ça me plaisait vraiment.
Sauf que⊠on nous faisait aussi passer des auditions, filmĂ©es. Et lĂ , je pleurais largement plus que je ne chantais. Ces auditions Ă©taient ensuite regardĂ©es pour entendre ce qui pouvait ĂȘtre amĂ©lioré⊠ce que je faisais Ă nouveau en pleurant.
Pas vraiment une expĂ©rience positive sur laquelle mâappuyer pour une interview filmĂ©e, donc. Et en mĂȘme temps, difficile de faire pire đ
Me préparer, à ma maniÚre
Ă cela sâajoutait le fait dâĂȘtre la premiĂšre Ă parler des rĂ©flexes archaĂŻques dans ce podcast, de parler dâanxiĂ©tĂ© et dâĂ©motions alors que je suis formĂ©e Ă des approches corporelles. Autant de peurs dâillĂ©gitimitĂ© qui se sont montrĂ©es, en plus des autres. Jâavais donc largement de quoi apprĂ©hender cette interview.
Alors je me suis prĂ©parĂ©e Ă ma maniĂšre. Quand je sentais le stress monter, quand je mâimaginais pendant lâinterview, quand jâai reçu le mail qui confirmait le jour et le sujet, jâai Ă©coutĂ© ce que mon corps avait Ă dire et jâai laissĂ© circuler mes Ă©motions. Et puis jâai observĂ© : face au mĂȘme mail, face Ă la mĂȘme scĂšne imaginĂ©e, mon corps rĂ©agissait diffĂ©remment. Jâavais fait du mĂ©nage, en amont, sur ce que je pouvais anticiper.
Le jour J : quand le systÚme nerveux doit gérer trop de choses à la fois
Et puis il y a eu ce que je ne pouvais pas anticiper.
Les stimulations imprévues
Ma bouche pĂąteuse, dâabord, encore et encore, malgrĂ© les gorgĂ©es d’eau bues en amont. Puis la chaleur ressentie dans le studio Ă mesure que l’interview avançait. La lumiĂšre aussi, vive, suffisamment proche de mon visage pour bien l’Ă©clairer. Le micro, au dĂ©but trĂšs proche de moi, presque envahissant. Autant de stimulations auxquelles mon systĂšme nerveux a dĂ» sâadapter, en plus de tout le reste.
Il y avait aussi le cadre mĂȘme de lâinterview : parler de ce que je fais, non pas Ă mon rythme, dans le sens oĂč ça me vient et parce que jâen ai envie, mais au rythme des questions. Des questions qui, au passage, mâont amenĂ©e Ă regarder mon travail sous un angle diffĂ©rent de celui que jâutilise habituellement.
Un nouvel angle, un nouveau chemin
Dâordinaire, je pars du corps et de son fonctionnement pour expliquer les effets Ă©motionnels. Cette fois, nous sommes parties des Ă©motions pour en arriver au corps. Nouvel angle, nouveau chemin. Et nouveautĂ© Ă©gale danger pour un systĂšme nerveux dĂ©jĂ sous stress. Pourtant je le savais. Je nâavais simplement pas anticipĂ© Ă quel point cela me perturberait.
Ă ce moment-lĂ , mon systĂšme nerveux avait beaucoup Ă faire : gĂ©rer la tempĂ©rature, sâadapter Ă la luminositĂ©, Ă la proximitĂ© du micro, au cadre, au rythme, aux regards. Et quand un systĂšme nerveux est occupĂ© Ă maintenir une forme de sĂ©curitĂ© face Ă des stimulations, il a forcĂ©ment moins de ressources ailleurs. Le mien ne fais pas exception et fonctionne comme ça aussi ! RĂ©sultat ; moins de place pour rĂ©flĂ©chir, pour organiser, pour retrouver certaines images, certaines mĂ©taphores que jâutilise pourtant trĂšs souvent.
Câest lĂ que les blancs arrivent. Que le cerveau se fige par moments. Que certaines rĂ©ponses se perdent en chemin, commencent par un bout et ne vont pas jusquâĂ leur fin.
Mon cerveau ne fait pas exception
Et câest exactement ce que vivent beaucoup dâenfants. Ă lâĂ©cole, Ă la maison, face Ă des adultes, face Ă des attentes, face Ă trop de stimulations Ă la fois. Leur systĂšme nerveux fait ce quâil peut pour rester en sĂ©curitĂ©, et pendant ce temps-lĂ , il nâest pas disponible pour apprendre, parler, rĂ©flĂ©chir, mobiliser ses compĂ©tences et rĂ©pondre « comme on lâattendrait ».
Ce nâest ni un manque de volontĂ©, ni un manque de capacitĂ©s. Câest un systĂšme nerveux occupĂ© ailleurs. OccupĂ© Ă faire ce pour quoi il est conçu en prioritĂ© : assurer la sĂ©curitĂ©.
En sortant du studio : lâatterrissage
Redescendre et revivre les blancs
Je suis sortie de lâinterview contente, vraiment. Ăa sâĂ©tait bien passĂ©. Jâavais rĂ©pondu aux questions, je nâavais pas pleurĂ©, et je pouvais enfin respirer.
Et puis⊠le nuage est redescendu.
Jâai commencĂ© Ă me souvenir de tous les blancs que jâavais ressentis dans ma tĂȘte face Ă certaines questions. Je ne sais pas encore si ces moments se retrouveront dans le podcast, mais moi, je les revivais dĂ©jĂ .
Tout ce que je nâavais pas eu le temps de dire, tout ce que je nâavais pas pensĂ© Ă dire, tout ce que mon cerveau avait bloqué⊠tout Ă©tait lĂ , dans ma tĂȘte. Des rĂ©ponses commencĂ©es par un bout et finies par un autre, des images et des mĂ©taphores que jâavais oubliĂ©es en chemin.
Ouch. Ăa a Ă©tĂ© dur.
Jâai traversĂ© beaucoup de tristesse, de colĂšre contre moi-mĂȘme, et de peur face au rĂ©sultat.
Je me suis surprise Ă ruminer sur ce que les autres allaient entendre ou comprendre, sur ce que jâavais âratĂ©â, alors mĂȘme que jâavais donnĂ© ce que je pouvais Ă ce moment-lĂ .
Fierté et ressources internes
Et en mĂȘme temps, une autre Ă©motion Ă©tait lĂ , bien prĂ©sente : la fiertĂ©.
La fiertĂ© dâavoir osĂ© dire oui. DâĂȘtre allĂ©e jusquâau bout. Dâavoir essayĂ©, dâavoir fait de mon mieux. Dâavoir su utiliser mes propres outils pour ĂȘtre mon propre soutien. Cette fiertĂ©, je la ressens encore aujourdâhui, et elle me rappelle que jâai Ă©tĂ© capable de tenir, mĂȘme face Ă mon systĂšme nerveux sous tension.
Alors jâai fait comme avant lâinterview : jâai Ă©coutĂ© les sensations dans mon corps. Jâai laissĂ© circuler les Ă©motions, mĂȘme inconfortables. Jâai fait mon mĂ©nage intĂ©rieur.
Au passage, mes rĂšgles ont commencĂ© le lendemain, et ce changement hormonal mâa aussi accompagnĂ©e dans ce relĂąchement. Avant les rĂšgles, la prĂ©sence de la progestĂ©rone fait quâon voit souvent les choses âpar en dessousâ, plus en noir. Avec lâarrivĂ©e des rĂšgles et le changement hormonal, il devient plus facile de voir les choses âpar dessusâ, plus en rose. Câest une aide physiologique qui a rendu ce relĂąchement un peu plus doux, plus lĂ©ger, et plus clair.
Petit Ă petit, lâangoisse sâest transformĂ©e en quelque chose de plus posĂ©. Je pouvais reconnaĂźtre : oui, ça a Ă©tĂ© difficile et ça l’est encore parfois, mais j’ai tenu, j’ai Ă©tĂ© lĂ , j’ai partagĂ© ce que je sais. Et c’est dĂ©jĂ Ă©norme !
Ce que je souhaite transmettre en écrivant cet article
Comprendre son systĂšme nerveux et celui de son enfant
En racontant tout ça, je veux surtout que les parents se reconnaissent â et quâils puissent imaginer ce que vit leur enfant. La lumiĂšre, la chaleur, les mouvements des autres autour, les questions, les regards⊠autant de stimulations qui peuvent tourner le systĂšme nerveux vers la vigilance, vers la sĂ©curitĂ©. Et quand le systĂšme nerveux sâoccupe de rester en sĂ©curitĂ©, il a moins de ressources pour autre chose : rĂ©flĂ©chir, rĂ©pondre, apprendre, ou simplement se dĂ©tendre.
Jâaide les enfants anxieux et stressĂ©s, et cette expĂ©rience mâa rappelĂ© Ă quel point je connais maintenant mon propre systĂšme nerveux, ce que mon anxiĂ©tĂ© me fait vivre, ce que je peux gĂ©rer facilement et plus difficilement quand elle se manifeste. Jâai aussi maintenant suffisamment de sĂ©curitĂ© intĂ©rieure pour utiliser mes propres outils pour mâapaiser et me soutenir, et mĂȘme adulte, on peut avoir besoin dâaide pour relĂącher complĂštement.
Alors, si vous ĂȘtes parent, observez non seulement votre enfant, mais aussi vous-mĂȘme, et notez ce que votre propre systĂšme nerveux ressent et fait dans ces situations. Quand vous ĂȘtes tendus, fatiguĂ©s ou inquiets, votre corps et votre cerveau rĂ©agissent eux aussi. Ces rĂ©actions sont normales. Comprendre ce fonctionnement peut vous aider Ă crĂ©er cet espace de sĂ©curitĂ© pour vous et pour votre enfant. MĂȘme de petits gestes, une prĂ©sence attentive, une respiration partagĂ©e, peuvent soutenir votre systĂšme nerveux et celui de votre enfant.
Continuer Ă partager et Ă me challenger
En partageant mon expĂ©rience, jâespĂšre avant tout aider les parents et les enfants, comme je lâai expliquĂ© dans cet article. En Ă©crivant ce texte, je mâautorise aussi Ă inviter dâautres interviews Ă se prĂ©senter et Ă avoir lieu, car jâai envie de continuer Ă aider par ce biais, et parce que jâai envie de continuer Ă me challenger et Ă regarder mes peurs en face. LâidĂ©e dâĂ©crire un livre un jour mâest mĂȘme venue, pour aller encore plus loin dans le partage.
Enfin, tout ce que je nâai pas pu dire dans lâinterview, ce que jâai complĂ©tĂ© ou rĂ©flĂ©chi aprĂšs coup, et tous les outils pratiques pour aider les enfants Ă rĂ©guler leurs Ă©motions et leur systĂšme nerveux, seront dĂ©taillĂ©s dans un 2á” article, en complĂ©ment du podcast La Matrescence.